Mahamadi Kouanda: « Si le CDP doit éclater pour que Eddie ne soit pas candidat, il éclatera »

Le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) traverse une des plus graves crises de son histoire. Deux camps s’affrontent depuis quelque temps quant à la désignation du candidat du parti à la présidentielle de 2020 au Burkina Faso, alors que le parti lui-même est en porte-à-faux avec ses propres textes sur plusieurs points. Parmi les meneurs de la contestation anti-Eddie Komboïgo, président du parti, il y a Mahamadi Kouanda, membre du Secrétariat exécutif et du Bureau politique du CDP. C’est lui l’invité de « Mardi Politique » de ce jour.

« Le Pays » : La Justice française a donné son accord pour l’extradition de François Compaoré au Burkina Faso. Quelle est votre réaction sur le sujet ?

Mahamadi Kouanda : Je suis très gêné. On ne peut pas être un homme qui veut la paix et être content du sort de François Compaoré. On ne peut pas non plus être humain et ne pas dire que justice soit faite pour Norbert Zongo. A tort ou à raison, François est suspecté selon la majorité des Burkinabè. Si François doit venir et si c’est Roch Marc Christian Kaboré qui est toujours président du Faso, je le pleure. Car, pendant longtemps, il a été collaborateur de François. Et en plus, pour ceux qui ne le savent pas, il y a des liens de famille entre François Compaoré et Roch Marc Christian Kaboré. La sœur cadette de François a donné sa fille en mariage au benjamin des Roch. Vous voyez que ce n’est pas facile. Dans tous les cas, si François doit venir, que Dieu l’amène dans la dignité et que ses droits soient respectés ici au Burkina Faso.

Des responsables du CDP estiment que l’extradition de François Compaoré est l’expression d’une « justice vengeresse » menée contre lui. Qu’en dites-vous ?

Je pense que ceux qui parlent au nom du CDP n’ont pas été mandatés par le parti. Le problème aujourd’hui, c’est qu’il y a des one man show qui font ce qu’ils veulent dans le parti et qui parlent au hasard. Je pense que certains militants de notre parti confondent leur posture personnelle avec celle du parti. Je veux vous dire une chose : ceux qui gesticulent en disant qu’ils soutiennent François, l’insultent, en réalité, en privé. Ce sont des hypocrites.

Le 30 mai dernier, vous et certains camarades avez claqué la porte d’une réunion du Secrétariat exécutif national (SEN) du CDP. Que s’est-il passé ce jour-là?

Ce qui s’est passé le 30 mai dernier est très grave en politique. A la réunion, nous étions moins de 53 personnes. C’est dire qu’on s’est réuni hors quorum. Je veux dire simplement que les 2/3 n’étaient pas atteints. Quand on a annoncé l’ordre du jour, j’ai été le premier à m’inscrire. Cet ordre disait : préparation du congrès du 16 juin et lecture du contenu d’une lettre du président d’honneur, Blaise Compaoré. Il était question également de se pencher sur la question du Bureau politique national dont le nombre de membres dépasse très largement 600 ; ce qui est en contradiction avec les statuts du parti. J’ai pris la parole pour demander au président s’il ne connaissait pas les règles relatives à la convocation des réunions du parti.

Sinon, il aurait dû se référer à ses adjoints, Achille Tapsoba notamment. J’ai proposé un amendement de l’ordre du jour. 1er point, j’ai proposé la vie du parti ; 2e point, la gouvernance de Eddie Komboïgo. S’il avait accepté ces deux premiers points, on allait corriger les listes arbitraires au niveau du Bureau exécutif, du Secrétariat permanent et du Comité exécutif. Tant que ces problèmes n’étaient pas réglés, je n’étais pas intéressé par un congrès. J’ai été honnête avec eux. Et s’ils forçaient, il allait y avoir deux congrès car j’étais prêt à convoquer un congrès et ce, pour plusieurs raisons. Je suis co-fondateur du CDP.

Le CDP a été officiellement créé en février 1996 mais le CDP n’est pas autre chose que l’ODP qui a été créée le 15 avril 1989 à mon domicile. C’est important pour vous et pour l’histoire. Je ne voudrais pas tout détailler ici, mais je voudrais dire que le CDP a une histoire. J’ai été partie prenante de toute l’évolution qui a donné naissance au CDP. Pensez-vous que moi je puisse sacrifier tant d’années d’engagement politique au profit d’un monsieur comme Eddie ? Quelqu’un qui confond la politique avec sa poche ? Qui n’a aucune parole ? Non ! Malheureusement aujourd’hui, il y a des gens qui n’honorent pas la politique et qui se trouvent aujourd’hui à la tête du CDP. Toute leur vie politique est basée sur la volonté et les largesses de Eddie Komboïgo. J’ai claqué la porte à cette réunion, pour me résumer, pour dénoncer la pagaille actuelle au sein du CDP. A titre d’exemple, j’ai vu des photos où des jeunes ont porté des tee-shirts CDP pour aller piller le matériel de Canal +. Ce sont des choses inacceptables. Plus de 180 travailleurs iront au chômage à cause d’un individu assoiffé de pouvoir, d’argent et prêt à tout pour être président du Faso.

« Je suis prêt à soutenir d’autres candidatures. J’ai ma candidate qui est Juliette Bonkoungou »

Pensez-vous que Eddie Komboïgo ne peut pas être président du Faso sous la bannière du CDP ?

Eddie peut être président du Faso mais ce sera sans le CDP. Si Dieu existe et que la terre du Burkina appartient à des Burkinabè honnêtes, Eddie Komboïgo ne sera pas candidat du CDP pour aller à la présidence. Toute ma vie a été CDP et je vais utiliser tous les moyens légaux, sociaux et humains possibles pour empêcher Eddie d’utiliser le sigle CDP pour chercher le pouvoir dans ce pays. On ne peut pas venir au CDP en 2012 comme Eddie l’a fait et vouloir emmerder les gens. Il a osé interpeller le député Daniel Sawadogo lors de la réunion dont vous parlez : « Toi, toi Daniel ! Tant que je serai président du CDP, tu n’auras pas la parole ; tu n’es rien ; tu n’as qu’un certificat d’études». Vous imaginez de tels propos ? Daniel n’est pas son enfant. S’il s’adressait à moi de la sorte, la réunion allait déraper. On ne pas dire des choses pareilles.

D’aucuns estiment que votre génération est dépassée !

Notre génération est dépassée signifie quoi ? Donnez-moi les noms de ceux qui tiennent des propos pareils et je vous répondrai.

Ne craignez-vous pas un éclatement du parti ?

Si le CDP doit éclater pour que Eddie ne soit pas candidat, il éclatera. Ma position est très claire. Je suis prêt à soutenir d’autres candidatures. J’ai ma candidate qui est Juliette Bonkoungou. Je dis au passage que je ne suis pas contre Kadré. S’il arrive à battre Juliette aux primaires, je le soutiendrai. Nous voulons d’un congrès où tous les candidats auront la même chance. Or, le congrès que le camp de Eddie tentait d’organiser, était anti-démocratique parce que les textes fondamentaux du CDP ont été bafoués.

Quelle est la position du président d’honneur, Blaise Compaoré, sur cette crise au CDP ?

Je suis désolé de vous le dire. Cette fois-ci, je n’ai pas reconnu Blaise Compaoré quand sa lettre a été lue. Je n’ai pas reconnu le leader qu’il a été. Blaise Compaoré a toujours été le meilleur de nous tous mais le contenu de sa lettre ne reflète pas l’homme que j’ai connu. J’ai été touché le 30 mai dernier quand sa lettre nous a été lue.

« Kadré a abandonné le CDP au moment où le parti avait besoin de lui »

Que disait la lettre ?

Je résume en trois points : moi, Blaise Compaoré, président à vie du CDP, je me suis donné le temps de concerter par rapport à la tenue du congrès extraordinaire ; j’ai eu le temps de réfléchir et je vous donne mon accord pour aller organiser le congrès sans délai. Je soutiens Eddie. Je précise qu’il ne l’a pas dit ouvertement mais certains mots laissent penser cela sans dire que je soutiens Eddie. En fait, il y a des parties, dans la lettre, qui éliminent plusieurs candidats. Si ce qui est dit dans la lettre est vrai, je pense que Blaise a été trompé. Moi, j’ai beaucoup travaillé pour Blaise ; je me suis battu pour lui et il sait ce que j’ai fait pour lui et le CDP. Blaise avait prévu de rencontrer les camps : Kadré- Léonce Koné, Kouanda- Juliette et Eddie- Achille. On devrait se voir à six à Abidjan avec d’autres camarades, pour tenter de résoudre la crise. Je me suis déplacé personnellement à Paris pour voir François Compaoré et j’attendais la date. J’étais préparé pour ça. Je ne comprends pas alors pourquoi il a écrit la lettre sans cette concertation.

Il se dit que Blaise Compaoré veut revenir au pays. Est-ce une bonne idée ?

Malgré ma déception, je souhaite que Blaise puisse revenir au pays dans la dignité et le respect de la part de nous tous.

Pourquoi Juliette Bonkoungou et non Kadré?

Rappelez-vous, en 2015, j’ai été le premier à dire que Kadré était le plan B pour faire face à Roch. En son temps, les Eddie et Fatou s’y étaient opposés. A cette période, Kadré était le meilleur. Malheureusement, je ne vais pas le juger, mais Kadré a abandonné le CDP au moment où le parti avait besoin de lui. J’ai soutenu la candidature de Jérôme Bougouma en 2015 pour la tête du CDP, pour l’homme de consensus qu’il est et à cause de ses qualités humaines et intellectuelles. Pour la candidature à l’élection prochaine, j’ai choisi de soutenir Juliette Bonkoungou pour son expérience. Elle a été constante dans sa position.

La Justice vous a donné raison en suspendant la tenue du congrès extraordinaire alors programmé pour le 16 juin dernier. Quel sentiment vous anime ?

J’ai de la fierté d’être Burkinabè. La Justice burkinabè mérite tout mon respect. J’ai toujours dit qu’il faut faire confiance à la Justice, quelle que soit sa décision à notre égard. Je vais vous dire que c’est à mon corps défendant que j’ai saisi la Justice. Au ministère de l’Administration territoriale où je me suis rendu, on m’a dit que l’administration ne pouvait agir qu’après le congrès. J’ai dû saisir la Justice. On n’avait pas le choix ; on a tout fait pour résoudre la crise mais Eddie et son clan ne voulaient pas nous écouter. Ils passaient leur temps à nous insulter. J’ai même été entendu par la Commission de contrôle où Eddie avait déposé une plainte pour demander une sanction contre moi. J’ai eu raison car la commission a conclu que je n’avais rien fait contre les principes du parti. Elle a même demandé une rencontre de réconciliation entre Eddie et moi, mais il a refusé. Lui, tenait coûte que coûte à me faire sanctionner.

Quelle sera la suite de votre combat ?

Eddie doit être sanctionné au prochain congrès. Tous ceux qui ont été impliqués dans la manipulation des textes du parti ou qui en ont été les bénéficiaires, doivent être sanctionnés. Dans tous les cas, je suis prêt pour le compromis, mais pas à n’importe quel prix.

Propos recueillis par Michel NANA

Le Pays

BEPC 2019 : Avec 18,18 de moyenne, Barry Yobi, une élève à encourager

BEPC 2019 : Avec 18,18 de moyenne,  Barry Yobi, une élève à encourager

Après 9 mois de dur labeur, les différents candidats au BEPC 2019 sont désormais situés sur les fruits de leurs efforts avec des fortunes diverses. Parmi les milliers de candidats de cette année 2019, il me plait de partager avec vous l’histoire de Barry Yobi, heureuse lauréate du BEPC 2019 pour le compte du Collège Marie Reine de Tenkodogo. Certes, elle n’a pas été la meilleure au cours de cette session mais, toute chose étant égale par ailleurs, c’est son parcours que je connais le mieux et qu’il me plait de partager avec vous.

Issue d’une famille modeste, Yobi est loin d’être une de ces filles à maman « gâtée » dès la naissance par la bien-aisance de ses parents. Avant elle, aucun membre de sa famille n’avait pris le chemin de l’école. Avec elle, ce serait la même chose, si elle n’avait pas intuitivement décidé d’elle-même de changer la donne. Coup du destin ?

Tel semble être le cas ! Un beau matin, Yobi, annonça fermement à son père, son désir ardent d’aller à l’école. Ce fut une stupéfaction totale au niveau de la famille d’autant plus que personne ne savait d’où lui venait cette idée saugrenue. Son père était sceptique, lui qui n’avait même pas songé à mettre le grand frère de Yobi à l’école, à fortiori Yobi elle- même. Il était vraiment réticent mais au regard de la détermination de Yobi et vu que sa mère ne s’était pas opposée à l’idée surprenante de sa fille, il finit par y adhérer.

A la rentrée scolaire 2008-2009, Yobi foula pour la première fois la cour de l’école bien distante de chez elle et dont elle aurait à parcourir le long chemin matin et soir, à pieds, malgré son jeune âge. Au CP1, tout se passa bien, de même qu’au CP2. Yobi se révéla une élève douée, talentueuse et disciplinée. Malheureusement, sa scolarité a failli tourner court.

En effet, à la rentrée scolaire 2011-2012, pendant que Yobi se préparait pour le CE1, son grand frère fugua et alla rester au loin chez ses grands parents. Quelle décision fut prise par son père ? L’ânesse met bat pour que son dos se repose, dit-on. Il opta pour la plus simple des solutions. Yobi fut contrainte de perdre une année scolaire pour garder le troupeau en lieu et place de son aîné absent.

Fort heureusement, avant la rentrée scolaire suivante, le grand frère réapparut et Yobi manifesta à nouveau son désir de repartir à l’école. Ce fut chose faite à la rentrée 2012-2013. Yobi reprit le chemin de l’école pour la classe du CE1. Tout se passa bien jusqu’au CM1 où son maître eut la bonne idée de l’inscrire au Certificat d’études primaires élémentaires (CEPE) au regard de ses formances scolaires. A l’examen blanc, Yobi quitta son école de trois classes et alla à l’école du village voisin se frotter aux costauds du CM2. Elle se classa première à l’examen blanc.

Au vrai examen, elle démontra haut la main que le maitre a été bien inspiré de l’inscrire pour le CEPE bien qu’elle soit en classe de CM1. Ce fut un grand succès. Yobi obtint le CEPE et l’entrée en 6ème. Cerise sur le gâteau, elle se classa première de sa circonscription et rattrapa en même temps l’année scolaire perdu en 2011-2012.

Pour la rentrée scolaire 2015-2016, le chemin du collège s’ouvrait à elle pour la classe de 6ème. Mais où ? Chez qui rester pour fréquenter. Trouver un tuteur n’était plus chose aisée comme par le passé. Entre -temps, le père de Yobi avait aussi fini par comprendre l’importance et la nécessité absolue que Yobi poursuive son école. N’avait-elle pas déjà rapporté un vélo flambant neuf à la maison, récompense de son rang de meilleure élève de sa circonscription scolaire ? Il demanda donc conseils sur la conduite à tenir au maître de Yobi qui lui suggéra d’envisager l’internat du collège Marie Reine de Tenkodogo, ce qu’il accepta sans hésiter.

Au test de recrutement, Yobi se classa troisième et fut retenue. A la rentée 2015-2016, pour la première fois, elle devait quitter ses parents pour la vie de l’internat en classe de 6ème. Au premier trimestre elle occupa le deuxième rang de sa classe et pleura amèrement. Au deuxième trimestre, elle rectifia le tir et prit la commande de sa classe qu’elle conserva pour de bon jusqu’en classe de troisième cette année.

De la 6ème à la 3ème, les moyennes générales de Yobi ont été les suivantes : 6ème : 18,60 ; 5ème : 18,75 ; 4ème : 18,39 ; 3ème : 17,13 en classe et 18,18 au BEPC. 
Comment ne pas avoir d’admiration pour une telle élève ? Et je reste convaincu que le meilleur reste à venir ? Yobi a très tôt su ce qu’elle veut et s’est frayée son chemin. Elle mérite un accompagnement spécial pour aller le plus loin possible. Après son résultat de la classe de 6ème, j’ai tenu à lui faire plaisir en lui offrant un cadeau. Bien entendu, je lui ai laissé la latitude de fixer elle-même la nature du cadeau qui lui conviendrait le mieux. En réponse, elle a souhaité avoir un bon dictionnaire de français. Je fus vraiment émerveillé.

D’autres à sa place auraient sans doute demandé un téléphone tactile !
J’ai tenu à partager avec vous le parcours de cette fille formidable, sereine, au calme olympien, qui aurait pu ne jamais aller à l’école n’eût été le coup du destin. Je lui souhaite une bonne suite au lycée et je reste convaincu que le meilleur reste à venir. Je remercie tous ceux qui l’ont soutenue, ont cru en elle ; l’ont enseignée et éduquée. Je ne citerai pas de nom mais ils se reconnaitront. Que le Seigneur les récompense au centuple !

Dr Issaka SONDE
La Pharmacie Citoyenne
Tél : +226 70 26 61 12

Vie politique : Le député Bienvenue Ambroise Bakyono victime d’un accident de la circulation en Côte d’Ivoire

Vie politique : Le député Bienvenue Ambroise Bakyono victime d’un accident de la circulation en Côte d’Ivoire

En séjour en Côte d’Ivoire avec ses camarades politiques pour des activités politiques (préparation d’un meeting), le député Bienvenue Ambroise Bakyono a été victime d’un accident de circulation, dans la soirée de lundi, 24 juin 2019, alors qu’ils avaient quitté Abidjan pour Yamoussoukro, la capitale ivoirienne.

Si le député s’en est sorti, tel n’est malheureusement pas le cas pour deux autres occupants qui étaient avec lui ; ils ont succombé à leurs blessures. Selon des responsables contactés au sein de son parti, le MPP, une des personnes décédées serait le petit frère du député du nom de Gildas Bakyono et l’autre, Joseph Bruno Bapina, un militant du parti résident à Léo.

Depuis quelques mois, les acteurs politiques burkinabè, notamment du parti au pouvoir, le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), marquent leur présence en terre ivoirienne, sans doute dans la perspective des élections de 2020 qui verront, pour la première fois, la participation de la diaspora burkinabè. La Côte d’Ivoire abritant le plus grand contingent de ces Burkinabè de l’extérieur (officiellement), le mouvement des hommes politiques vers cette contrée se justifie donc.

Lefaso.net